Voilà. La pause est terminée, on reprend le fil ; non sans peine, parce qu’il faut un peu tout reconstruire. D’abord je dois me recomposer, récupérer tous les morceaux de moi que j’ai éparpillés un peu partout.
Ensuite, je dois retrouver mes personnages familiers qui, bien entendu, ont sauté sur l'occasion pour prendre le large : M. Brume a retrouvé sa plume et ses livres. Barnabé n’a pas quitté le quartier, mais cela n’a rien à voir avec sa présence ou son absence : sa vie se déroule à des années-lumière de ce monde. Et je ne sais pas ce que Mirabelle est devenue. Je vais tenter de les retrouver et les supplier de revenir me prêter leurs voix. J’ai besoin d’eux: ils sont les vrais auteurs des mots et des pensées que je leur attribue.
P.S. Brume n’est pas loin, à ce qu’il me semble. Il y a quelques semaines, il m’avait confié un manuscrit : Déclin d’une civilisation, en me disant d’en prendre soin, qu’il avait bien le temps, qu’il s’y remettrait à l’occasion. Et je m’aperçois à l’instant qu’il est repassé discrètement, hier ou avant-hier. Sur la chemise, à la place du mot « déclin », biffé en rouge, il a écrit «effondrement». Et le manuscrit n’est plus là.
(Plus sérieusement, je vous encourage à lire, dans le dernier numéro du Courrier international (946 - 947), le dossier consacré à "Ces civilisations qui disparaissent". Ça fait froid dans le dos.)