Ce matin, j'enfonce une porte ouverte. Et demain, une autre, peut-être.
« Je n'ai pas d'idées, alors je n'écris pas » : c'est la meilleure manière de ne pas écrire, de ne plus écrire, et, finalement, de ne plus avoir d'idées du tout.
On n'écrit pas parce qu'on a des idées, mais bien, justement, pour avoir des idées.
C'est voir les choses à l'envers que de considérer l'écriture seulement comme la forme que l'on donnerait à une pensée toute faite. Tout au contraire l'écriture est le processus le plus efficace pour extraire les idées de notre subconscient, en assurer l'élaboration, les relier avec d'autres idées et produire des constructions mentales tout à fait imprévues, et parfois étonnantes.
Au fond de nous-mêmes, des germes de pensée se pressent, qui ne demandent qu'un petit effort d'attention pour être être capturés, portés au jour et développés. Cela ne se fait pas tout seul, ce n'est pas simple, c'est un vrai travail, mais quelle jubilation de tirer de soi-même des richesses insoupçonnées, de conduire un raisonnement jusqu'à son terme, de transformer les idées vagues en concepts rigoureux !
Pour dire les choses autrement, nous sommes comme un vaste pays dont seul un tout petit canton aurait été exploré et mis en valeur, dont une part importante serait vaguement soupçonnée, dont l'essentiel resterait totalement inconnu, totalement mystérieux, quoique nullement inaccessible.
L'exploration de ce vaste pays est une nécessité pour quiconque tient à prendre la mesure de sa propre humanité et la pratique quotidienne de l'écriture est le plus beau moyen d'y parvenir.